2009 Prix John-McMenemy
Lauréate : Debra Elizabeth Thompson
Is Race Political?, Revue canadienne de science politique, 41:3
Extrait du rapport du jury : L’article exceptionnel de Debra Thompson est le premier texte sur la race en science politique que publie la Revue depuis le message annuel du président de Vince Wilson de 1993. Selon Thompson, cela illustre une ‘déconnexion fondamentale’ entre « la réalité sociale et la réalité démographique du Canada, qui démontre l’importance de la race et le silence de la science politique anglocanadienne vis-à-vis à la fois de la conceptualisation de la race comme produit politique et de l’incorporation de la race en tant que variable explicative importante dans l’analyse de phénomènes politiques ». (525)
Thompson démontre brièvement la nature politique de la race au Canada, puis explore des explications possibles de la rareté des écrits sur la race en science politique par rapport à d’autres sciences humaines. De nombreux Canadiens anglais considèrent toujours la race comme un problème qui s’arrête à la frontière canado-américaine et Thompson conclut que l’apparition de la race comme descripteur dans seulement 1,6 % des articles parus dans grandes trois revues de science politique est ‘honteuse’. Son analyse prend en outre au sérieux les difficultés qu’ont eues dans le passé des chercheurs canadiens-anglais à trouver de ‘l’espace’ pour l’analyse de la race dans nos principaux cadres théoriques. L’un des problèmes est la place importante accordée par ces cadres aux élites et décideurs politiques – majoritairement des hommes blancs. Un autre problème est l’accent que met la discipline sur la politique au Canada; curieusement, il y a eu peu de travaux sur les États-Unis.
Thompson suggère en outre dans son article des conceptualisations possibles de la race qui permettraient à ce concept de prendre place à côté de thèmes familiers, comme les nationalismes québécois et autochtone et le multiculturalisme. Rejetant les approches daltoniennes parce qu’elles effacent les minorités raciales en polarisant l’attention sur les intervenants faisant partie de l’élite, Thompson soutient que la discipline doit revoir son parti pris en faveur des approches daltoniennes privilégiant l’élite. Elle défend la thèse que les autres sciences humaines incorporent plus explicitement des questions et des idées au sujet de la race parce qu’elles se penchent sur les phénomènes de masse comme sur ceux qui touchent à l’élite et explorent des tendances à l’échelle mondiale. Thompson fait également observer qu’il pourrait être utile de voir comment les politologues francophones au Canada traitent des questions raciales – une suggestion qui pourrait nous regrouper dans un projet commun. Voilà donc un article intéressant qui incite à la réflexion.